“Athletic Body in Balance” de Gray Cook

 

Mon verdict

Un livre qui souffre des problèmes habituels quand à sa partie programmation et sa capacité à être consulté. Néanmoins, il a l’avantage énorme de pousser les thèmes de la stabilité et de la mobilité sur le devant de la scène. 6/10

 

Introduction

Gray Cook est un auteur connu pour son livre « Functional Movement System » qui est paru en 2010. Ce dernier ne m’avait pas touché alors qu’il est un livre relativement populaire dans le monde de la préparation physique.

« Athletic Body in Balance » est son premier livre publié en 2003 et republié en français aux éditions 4trainers en 2019.

J’avais décidé de redonner sa chance à Gray Cook, car depuis 9 ans que je suis coach sportif, il m’est arrivé d’avoir eu des mauvais aprioris sur des livres que j’avais trouvés plus intéressants quelques temps après. De plus, je suis arrivé à un moment de ma vie d’athlète où les douleurs sont devenus de plus en plus persistantes.

Je pense que je me suis trop longtemps entraîné sur des points faibles causés par des traumas que j’ai développés suite à mes nombreux accidents. Je suis aujourd’hui donc limité dans mes entraînements car j’ai négligé ces points faibles beaucoup trop longtemps et ils reviennent me sanctionner à travers plusieurs douleurs récurrentes. Mais on reviendra à ça à la fin de l’article.

 

Présentation du livre

Des idées intéressantes

Le livre se sépare en cinq parties. La première est une brève réflexion sur le mouvement athlétique. La seconde partie concerne l’évaluation et l’entraînement de la mobilité et de la stabilité. Enfin les troisièmes et quatrièmes parties abordent l’entraînement de la force, l’endurance, la puissance, la vitesse et l’agilité tandis que la cinquième partie aborde la programmation.

J’ai trouvé le livre intéressant pour plusieurs concepts :

A) La pyramide de performance qui est composé de trois facteurs qui sont :

o   Les mouvements fondamentaux basés sur la mobilité et la stabilité qui sont la base de la pyramide.

o   La performance qui est lié majoritairement à la puissance et qui est le deuxième niveau de la pyramide.

o   La compétence spécifique pour se spécialiser dans une activité ou dans un sport constitue le troisième niveau de compétence.

A savoir que le premier niveau est nécessaire pour le second niveau qui l’est lui-même pour le troisième niveau.

B) Le parallèle entre le cadran d’une voiture qui alerte sur un problème et la douleur qui alerte sur une faiblesse du corps que l’on choisit trop souvent d’ignorer. Ce choix se fera souvent par méconnaissance de notre corps, par espoir d’un soin miraculeux ou par résignation.

C) Quand on travaille en unilatéral, il vaut mieux commencer à travailler sur le côté sain quand on débute un exercice afin d’explorer les bonnes sensations et ce qui fait sens.

D) La nécessité d’apprendre à détecter les muscles faibles de son corps afin qu’ils fassent leur boulot. Gray Cook le résume bien dans cette citation :

 « Si un muscle semble tendu, c’est probablement parce que vous essayez de l’utiliser au mauvais moment, dans la mauvaise séquence et dans une mauvaise position. Arrêtez de l’utiliser. En faisant cela, vous pouvez apprendre quelle autre partie du corps vous n’utilisez pas. Prenez le temps et soyez patient ».

Les réflexions initiales sont intéressantes. Le travail sur la mobilité et la stabilité a été novateur dans mon apprentissage personnel et je trouve qu’on retrouve peu ailleurs des tests pour éprouver ces deux qualités et des exercices pour les améliorer.


Critiques

En revanche, les parties suivantes sur le travail des autres qualités physiques et sur la programmation sont inintéressantes. On a des listings d’exercices associés à des réflexions un peu sortis de nulle part même si certaines comme celle concernant la corde à sauter ont pu me plaire. Malheureusement, la plupart souffrent trop de la réflexion de comptoir. Comme à la page 77 où l’auteur loue les exercices de yoga sans parler desquels. Je trouve que ça s’apparente beaucoup à de la pensée magique. Enfin, comme d’habitude, la partie programmation souffre d’un manque de qualité flagrante.

D’ailleurs, le livre manque de schémas et de pages de référence sur lesquelles on peut revenir facilement. Ça a été d’ailleurs un déclic pendant la lecture de ce livre. Je trouve que beaucoup d’auteurs et d’éditeurs de livres de sport ne conçoivent pas leurs œuvres comme des objets de consultation. Or, il faut que l’on puisse revenir facilement à des thèmes qui cliqué dans notre esprit. Il faut que l’on ait des récapitulatifs auxquels on puisse se référer facilement.

Ça n’est nullement le cas ici.

C’est vraiment dommage car les tests et les exercices de stabilité et de mobilité m’intéressent beaucoup. J’ai vraiment envie de les tester dans un cycle d’entrainement. J’aime beaucoup la réflexion qui les supporte mais la forme et la présentation ne suivent pas malgré le bon travail d’édition de 4trainers et le travail de traduction de Pierre Debraux et d’Aneliya Manolova.

En conclusion, Athletic Body in Balance est un livre dont tout le contenu n’est clairement pas révolutionnaire et qui souffre d’une grande inégalité qualitative, tant de par la forme que par le fond. Par contre, j’ai l’intuition que Gray Cook tape juste en parlant aussi bien des qualités de stabilité et de mobilité. Si ces qualités vous intéressent. Les deux premières parties du livre peuvent être intéressantes à lire.

 

Une histoire personnelle

En dernière partie, je veux revenir sur la nécessité de chercher les muscles faibles de son corps. C’est un point super cool de ce livre. Je suis le premier à m’être entraîné par orgueil et « devoir d’exemplarité » en tant que coach sportif. J’ai continué toutes ces années à faire de la force, de l’hypertrophie, des sprints et du saut alors que j’aurais dû continuer à chercher l’origine des douleurs que je vis au quotidien pour voir comment les traiter.

J’adore sa pensée qui dit que nos points forts sont forcément limités par nos points faibles. C’est très intéressant car l’entraînement de ces derniers peut apparaître comme étant moins exigeant que l’entraînement des points forts et on peut alors penser que ce ne sont pas de vrais entraînements. Pourtant, suite à la lecture du livre, j’ai supprimé mon entraînement d’hypertrophie actuelle et j’ai modifié mes entraînements.

J’ai d’abord fait un programme d’action du trapèze inférieur et des moyens fessiers pour traiter des douleurs que j’ai au trapèze et au fléchisseur de hanche gauches que je traîne depuis 15 ans. Le programme a d’abord été bénéfique avant de voir les douleurs revenir et je l’ai modifié en rajoutant des mouvements du cou. Pour cela, je m’allonge sur le dos et fais de la flexion, de la rotation, de l’inclinaison latérale et de la translation du cou.

L’entraînement a été salvateur et j’ai donc voulu travailler sur mes douleurs au fléchisseur de hanche à gauche. Je travaillais debout pour essayer de faire des mouvements d’adduction et de flexion de la hanche mais je n’arrivais pas à isoler les muscles concernés. J’ai eu finalement l’idée de m’allonger pour travailler la flexion et l’adduction de hanche en unilatéral et le soulagement a été assez incroyable. Je pense que mon adducteur gauche n’était pas assez fort. Je continue évidemment à travailler le moyen fessier également en isolation.

Bref, tout ça pour dire que je me suis rentré dans le crâne toutes ces années que je devais faire des « vrais » entraînements qui ciblaient une qualité physique forte. Je ne me suis jamais autorisé à m’attarder sur des petites choses et notamment sur ces points faibles. D’une part parce que ça prend du temps de chercher et de planifier. Mais aussi parce qu’il y a un sale orgueil très mal placé assez commun chez les hommes et encore plus chez les coachs sportifs. Je suis content que la lecture de ce livre m’en ai fait prendre conscience et ait procédé à ce déclic.

Ça s’est accompagné de plein de choses différentes : je suis allé revoir un ORL pour un problème de respiration que je trainais depuis longtemps et que je repoussais car je m’étais déjà fait opérer, je suis allé voir un chirurgien pour une douleur au poignet que je trainais, je me suis bougé pour aller chez le dentiste pour une carie….

Bref, le rapport au corps et à la douleur est spécial. On peut être paresseux ou taire la douleur pour plein de raisons mais je pense qu’il est important de lutter pour son corps en empruntant plein de chemins possibles : continuer à aller voir des médecins même si le premier n’a pas marché, même si le contexte est horrible avec des campagnes publiques nous enjoignant à ne pas boucher les urgences, même si c’est chiant et qu’on a été maltraité par un médecin. Le but est de multiplier ces rendez-vous jusqu’à ce qu’une solution ait été trouvée car vivre avec la douleur est épuisant.

Deuxièmement, le second chemin consiste à prendre soin de son corps en ayant une hygiène non seulement sanitaire mais aussi physique. Et c’est là où intervient l’entraînement qui est beaucoup trop négligé dans notre société, par moi-même en premier. Encore une fois, il faut multiplier les exercices, les programmes pour voir ce qui nous fait du bien et ce qui nous rend plus heureux.